Techniques pour optimiser les apports azotés
Comment faire en sorte que l’azote soit valorisé au mieux par les cultures pour limiter les pertes ?
Fractionner les apports
Fractionner les apports permet de limiter les pertes par lessivage, d’éviter les suralimentations azotées à l’origine de maladies potentielles et de favoriser la qualité du produit final.
Exemple sur blé tendre d‘hiver :
Il est inutile d’apporter des grosses doses d’azote au premier apport car au stade tallage, le blé ne peut les valoriser donc les pertes seront conséquentes.
- Apporter de l’azote au tallage si le reliquat 1er horizon est inférieur à 60 UN → apporter 40 UN max (au delà l’azote ne sera pas valorisé).
- 2ème apport : encadrer le stade épi 1 cm si plus de 100 UN apportées.
- 3ème apport : 40- 60 UN (dépend de la variété) surtout pour le taux de protéines.
Mettre en place une bande “double densité”
La bande “double densité” (BDD) est un indicateur simple, fiable et visuel pour savoir quand déclencher le premier apport.
Principe de la méthode :
- Choisir une zone représentative de la parcelle et de doubler la densité de semis sur une bande de 30 m de long et 3 à 6 m de large au moment du semis.
- Doubler le nombre de plantes entraîne une consommation d’azote plus importante et plus précoce sur cette bande que sur le reste de la parcelle.
- L’apparition d’une décoloration jaune à partir de fin janvier sur la bande traduit une carence précoce et permet d’anticiper l’apport azoté. Dès que l’on observe la décoloration, il est recommandé d’effectuer le premier apport dans les 7 jours qui suivent.
Exemple sur blé tendre :
- Le 1er apport de 40 UN est déclenché lorsque cette BDD décolore par rapport au reste de la parcelle. Il est réalisé au plus tard au stade épi 1 cm.
- 2ème apport (X – 80) est déclenché 20 à 25 jours après le 1er apport (200 degrés jours). Il est réalisé au plus tard au stade 1 nœud.
- 3ème apport (40 unités) est réalisé au plus tard au stade dernière feuille étalée - gonflement.
→ Dans le cas où la bande double densité décolore à un stade proche du stade épi 1 cm, l'impasse du 1er apport peut être envisagée.
Les différentes formes d’azote
Quelle forme d’engrais azoté est la plus efficace ?
Le nitrate est la forme principale d'azote utilisée par les plantes. Aucune transformation n’est nécessaire pour son absorption.
L'urée, quant à elle, doit d’abord être transformée en ammonium pour être absorbée. La vitesse de cette transformation dépend de la température du sol. Cet azote a donc un effet retard et l’apport doit être anticipé.
Voici un graphique venant d’un essai d’Arvalis de 2013 visant à mesurer l’efficacité des différentes formes d’engrais azotés sur blé tandre : ammonitrate, urée et Nexen (urée + retardateur de minéralisation).
→ On remarque que l’ammonitrate et le Nexen sont légèrement au-dessus de l’urée en termes d’efficacité.
→ Cependant, l’urée est quasiment au même niveau dès lors que l’engrais est bien positionné.
Optimisation des apports : conditions météo
Pour bien positionner l’azote, il est important :
- Que l’apport soit suivi par de la pluie pour qu’il soit bien valoriser.
- D’éviter des conditions venteuses.
- D’éviter des températures > 15°C.
→ Sinon, la volatilisation entraîne des pertes sous formes gazeuses.
Optimisation des apports : oligo éléments
La solution azotée peut être adjuvantée pour améliorer sa valorisation.
Voici un mélange recommandé par l’équipe d’agronomes d’AgroLeague pour stabiliser l'azote dans une solution azotée est la suivante :
- 1 unités de soufre (ou 3 unité de sulfate) pour 10 unités d'azote via un thiosulfate (agent réducteur qui permet de stabiliser l’azote dans la solution). Si il n'y a pas assez de soufre, la vie microbienne ne va pas pouvoir stabiliser toute l'azote et risque de consommer du carbone du sol afin d'avoir le soufre nécessaire pour transformer l'azote.
- 3% de mélasse (3% de la bouillie) : la mélasse va stimuler les bactéries et entrainer une transformation de l'azote en acides aminés.
- 1 L/ha d'acide humique-fulvique : permet une chélation et une stabilisation via les acides organiques. Cela rend l'azote moins lessivable.
- 20 g/ha de de molybdène : le Mo agit comme nitrate réductase, transformation de l'azote en acides aminées.
Ce mélange permet de limiter la volatilisation, de "chélater" l'azote par les acides organiques et de la rendre plus bio disponible pour la culture. En transformant l'azote, on limite la nitrification et le lessivage.
Optimiser le coefficient apparent d’utilisation
Le coefficient apparent d'utilisation de l'azote (CAU) correspond à la fraction de l'azote total d'un engrais (minéral ou organique) qui est absorbée par les cultures jusqu'à la moisson.
Voici un graphique issu de la thèse de Hazzar Habbib visant à étudier l’impact des systèmes de cultures sur l'efficience d'utilisation de l'azote chez le blé et le maïs.
Ont été croisées les influences de la dose d’apports azotés, du travail du sol et des couverts végétaux d'interculture.
Plusieurs apprentissages peuvent en être tirés :
- Le coefficient apparent d’utilisation est plus élevé pour les modalités sans apport d’azote minéral :
- D’un point de vue physiologique, les plantes sont en carence et valorisent donc mieux le peu d’azote qu’elles trouvent dans le sol.
- Intéressant d’un point de vue recherche, cette option n’est évidemment pas envisageable sur le terrain au vu des faibles rendements obtenus.
- Autour de 160 UN, le coefficient apparent d’utilisation est le plus élevé en système semis direct seul et SD + couverts végétaux. Dès lors que l’on ne travaille pas le sol et que de l’azote organique est apporté par les couverts végétaux composés de légumineuses, le besoin en UN/q diminue.
Destruction des couverts et implantation des cultures d'automne